J’aimerais aujourd’hui rendre hommage à toutes les écoles du district de Nyagatare qui, depuis bientôt neuf mois, nous ouvrent généreusement leurs portes et nous accueillent si chaleureusement!
Depuis la mi-septembre, mon collègue Daniel et moi sommes à chacune de nos visites reçus dans les écoles avec le sourire, déférence, et selon un protocole réservé d’habitude à de grands dignitaires.
L’accueil est souvent bouleversant.
Comme en témoignent les photos ci-dessous, prises lors de notre visite, mercredi, à l’école primaire Ntoma, située dans le secteur de Matimba, à quelques kilomètres seulement de la frontière avec l’Ouganda…
Sous la supervision des enseignants, les membres du club Tuseme de l’école ont voulu partager avec nous quelques unes des danses traditionnelles de la région…
Toute l’école a assisté au spectacle!
Le rituel de nos visites est maintenant bien rôdé.
Après un entretien au téléphone avec le directeur de l’établissement afin de confirmer la logistique et les objectifs de notre visite, nous arrivons en général à l’école vers 8h30 ou 9 heures, en moto-taxi. (Merci à mon collègue Daniel pour quelques unes des photos suivantes)
Le trajet jusqu’à l’établissement a souvent été une aventure. (Notre record jusqu’à présent : 2h45 de moto (aller simple) pour rejoindre, de Nyagatare, l’école primaire de Gashahi, dans le secteur de Mukama)
Chacune de nos visites se déroule à peu près selon le même scénario. Les enseignants et les élèves, avertis de notre arrivée, se sont préparés. L’école toute entière nous attend. À peine descendus de moto, nous sommes reçus par le directeur et nous nous dirigeons vers son bureau, accompagnés du regard de centaines voire de milliers d’élèves!
Le nombre d’étudiants dans les écoles est ahurissant. Plus de 3500 élèves sont inscrits à l’école primaire Ntoma où nous étions mercredi. Certaines écoles primaires, dans le secteur de Nyagatare, ont plus de 4200 élèves!
L’explosion démographique est l’un des grands défis de la société rwandaise où jusqu’à tout récemment, une « vraie » famille devait compter au moins sept enfants…
Les professeurs que nous venons rencontrer, écouter, observer, nous accueillent avec la plus grande gentillesse. Ils enseignent souvent à plus de 80 élèves, répartis en deux groupes, l’un vient à l’école le matin, de 7 heures à 11 heures 40. Un deuxième groupe assiste aux cours l’après-midi, de 12h40 à 17 heures environ.
Je vais dans les classes observer une leçon, accompagné du directeur ou du directeur-adjoint. Les défis sont immenses. Certaines classes manquent de tout. Il n’y a très souvent pas d’électricité. Pas ou peu de livres. L’infrastructure des classes est défaillante. Vitres ou pupitres brisés. Plusieurs professeurs ne maîtrisent pas l’anglais, pourtant langue officielle d’enseignement.
Malgré tout, il règne dans la plupart des écoles une atmosphère positive et pleine d’espoir.
Les chefs d’établissement sont en très grande majorité compétents, honnêtes, respectueux envers les enfants et les enseignants. Je travaille avec eux sur le plan stratégique de l’école. Ils font souvent des miracles avec très peu de moyens.
Avec raison, ils sont très fiers de leurs réussites. La propreté du terrain, les arbres qui ont été plantés, les deux ou trois vaches dont s’enorgueillit l’école et qui fournissent, tous les matins, le lait aux enseignants.
Certains professeurs (les jeunes et les célibataires surtout) résident dans des bâtisses aménagées sur le terrain de l’école par le Ministère de l’Éducation. Ils partagent une chambre avec un collègue.
Après les observations, les réunions de partage, tradition rwandaise oblige, plusieurs écoles ne veulent pas nous laisser repartir le ventre vide. Des enseignantes ont préparé un repas. Un plat de viande (en général du bœuf), des bananes vertes, du riz, de la sauce, des haricots, du manioc, nous attendent dans la salle des professeurs ou dans le bureau du directeur.
Nous dégustons ensemble la cuisine du pays…
La tradition est respectée. Les visiteurs repartiront, rassasiés.
Quel impact notre travail aura-t-il dans les écoles?
Nos suggestions, nos conseils seront-ils entendus?
Notre présence contribuera-t-elle, au niveau du district, à améliorer la gestion scolaire et la qualité de l’enseignement?
Difficile à dire.
De façon plus large, pour nous, coopérants venus du Nord, faut-il transférer dans les écoles en Afrique les valeurs et les critères de « réussite » véhiculés par le système scolaire des pays dits développés?
Système scolaire où priment, souvent, la performance, le succès individuel, le résultat, la compétition entre les élèves.
Les valeurs sont différentes ici.
La culture africaine, elle, privilégie plutôt la tradition, la qualité de l’accueil, la patience, le silence, les relations entre les familles, l’appartenance au groupe et à la communauté.
Comment concilier et harmoniser dans les écoles ces deux cultures?
Question difficile et complexe!
Il reviendra aux autorités scolaires et aux enseignants rwandais de trouver ensemble la réponse…
Bonjour Max,
Quel satisfaction pour toi d’avoir eu la chance de faire la difference dans les écoles du Rwanda. Ils vont certainement garder tes conseils et s’en servir à l’avenir. Bravo à toi et aux autres membres de CUSO!
Merci, Nancy! Honnêtement, seul le temps pourra dire si notre présence ici aura fait une différence… J’espère que oui, bien sûr, mais le changement – vrai, authentique, profond – prend comme tu le sais beaucoup de temps…
Cher Max,
Je suis émue par tes photos…par tes récits. Puisque j’ai seulement des tables dans ma salle de classe les élèves s’asseoient ensemble et des fois ils doivent travailler individuellement ou travailler en groupe…pédagogie différenciée… Est-ce qu’on peut dans les écoles au Rwanda déplacer les tables et mettre les élèves en petites équipes? Ou est-ce que les écoles sont plutôt traditionnelles…? Dans ma classe j’apprends de mes élèves…co-teaching; co-learning…est-ce possible de faire cela au Rwanda? En voyant tes photos je sais que si j’enseignais là-bas je passerai beaucoup de temps dehors dans la nature en enseignant-intégrant tous les sujets du curriculum ensemble…Les classes sont très grandes…comment le prof fait-il pour évaluer autant d’élèves?… En voyant les classes il me semble que les élèves adorent l’école…Tous les enfants du monde apprécient et ont le droit à l’éducation …
Merci, et bravo P au P! Tes suggestions sont excactement celles que nous essayons de partager avec les équipes scolaires! Tu devrais songer à venir partager ton expérience!
Trop souvent, l’enseignenent ici se résume, pour les élèves, à écouter le professeur et/ou à copier des notes écrites au tableau… Heureusement, partout au pays, les choses, petit à petit, commencent à changer, et de plus en plus de professeurs essayent de mettre en oeuvre de nouvelles stratégies d’enseignement… Mais il y a encore beaucoup de travail à faire pour changer les pratiques désuètes, malheureusement bien ancrées dans certaines écoles…